mercredi 9 novembre 2011

Festival Enesco 1958 : récital Oïstrakh

La collection de la Radio Roumaine sur le premier Festival Enesco comblera les admirateurs de David Oïstrakh, qui apparaît sur trois des quatre albums consacrés aux concerts de l’Athénée. Le 20 septembre 1958, le violoniste russe présente un récital de musique de chambre, en duo avec le pianiste Vladimir Iampolski. Un concert d’une ampleur certaine – près de 80 minutes – composé, comme on le verra, de pièces parmi les plus exigeantes du répertoire, aussi bien pour les musiciens que pour le public.

La Sonate en sol mineur de Tartini « Didone abbandonata » est moins connue que les « Trilles du Diable », sans aucun doute à cause de la légende sulfureuse qui entoure la genèse de ce dernier morceau. On mesure à l’audition l’injustice de cette situation, tant d’un point de vue musical la partition défendue par Oistrakh et Iampolski mérite tous les éloges.

Incomparablement plus célèbre, la Sonate de Franck est une œuvre maîtresse du répertoire d’Oïstrakh. Il faudra ajouter aux quatre ou cinq versions déjà disponibles cette captation lumineuse dans laquelle l’esprit poétique et tourmenté de César Franck s’épanouit sans heurt.

Deux regrets : Fritz Kreisler a cru bon de réviser la Fantaisie op. 131 en do de Robert Schumann, et David Oïstrakh a cru bon d’ajouter cet arrangement d’un quart d’heure au programme. Un jeu irréprochable pour une partition contestable, tant on préfère écouter Schumann tel qu’il a été écrit. Mais il est vrai que l’époque voulait que l’on retouchât sans vergogne un compositeur fort injustement décrié pour ses faiblesses.

Les trois Mythes de Karol Szymanowski d’après Ovide renouent avec l’Antiquité. En inscrivant ces pièces au récital, le violoniste voulait vraisemblablement saluer le pays où l’auteur des Métamorphoses finit ses jours. Cette musique entre deux âges et sans concession – un peu à la façon d’Enesco d’ailleurs, dont on se prendra à évoquer plus d’une fois ici les extraordinaires Impressions d’enfance – réclame une profonde attention de l’auditeur. L’on admire le soin apporté à chaque nuance de ce discours musical exigeant et d’apparence aride.

La rhapsodie Tzigane de Maurice Ravel offre un final extraverti à ce programme un peu sévère. David Oïstrakh s’empare de ce morceau d’une virtuosité cauchemardesque pour le jouer de la façon la plus naturelle que l’on puisse s’imaginer. Un tour de force pour parachever un concert qui ne l’est pas moins.

En complément, un extrait des entretiens d’Enesco et Gavoty sur la virtuosité, et un interminable panégyrique de la musique roumaine par David Oïstrakh, que l’on imagine dicté par des raisons idéologiques. Discours sans fond et donc inutile.

Référence : Editura Casa Radio 269

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